Guides et porteurs au Népal et leurs métiers

29 février 2024
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Le métier de guide de trek s’est développé au Népal après les années cinquante quand le pays s’est ouvert aux expéditions et aux treks. Le métier de porteur existait déjà depuis très longtemps pour acheminer les marchandises en montagne où il n’y a pas de route…Grâce à l’organisation des treks, beaucoup de Népalais peuvent travailler comme guide ou porteur pendant les saisons de treks à l’automne et au printemps et s’occuper de leurs cultures à leur village pendant la basse saison, l’été et l’hiver.

Je m’appele Dipak pangeni Guide du trek au népal.Mon métier de guide… comme beaucoup d’autres guides, je l’ai appris petit à petit en commençant comme jeune porteur, et puis après, comme assistant guide et enfin comme guide… J’étais très jeune et il fallait gagner ma vie pour aider mes parents au village.  C’est ainsi que je suis venu à Katmandu et que j’ai commencé à travailler comme porteur pendant plusieurs années. J’ai commencé à apprendre ainsi et j’ai petit à petit acquis de l’expérience. Il y a beaucoup de guides qui ont commencé comme moi, comme porteur et qui avec le temps et une formation sont devenus guides.

Comment s’organise l’équipe népalaise qui va accompagner votre trek?

Lors d’un trek, l’équipe népalaise qui va vous accompagner est bien structurée. Elle se compose généralement d’un guide (sirdar), d’un cuisinier et de porteurs. Selon le nombre de personnes dans le groupe, il y a aussi parfois un assistant guide. Lorsque le trek est en bivouac, l’équipe de porteurs et de cuisiniers est plus nombreuse afin d’assurer la logistique durant le trek. Chaque personne dans cette équipe est importante et a une fonction bien précise qui contribue au succès du trek.

Le guide est désigné par l’agence et ensuite, c’est lui ou son assistant (chef des porteurs) qui va choisir ses porteurs. Il les trouve généralement à Katmandu par le réseau d’amis ou de connaissances. La plupart des porteurs sont originaires de Trisuli Kavre, du Solukhumbu (région de l’Everst) et Okhaldhunga (Sud de la region de l’Evrest), Dading, etc. Parfois pour les treks en bivouac, nous avons besoin de beaucoup de porteurs et nous devons alors aussi recruter des porteurs sur place dans les villages au début du trek. Ce n’est pas toujours facile de choisir les porteurs que nous ne les connaissons pas et, il faut parfois quelques jours avant de savoir s’ils sont de confiance et s’ils font bien leur travail.

Le guide est responsable du groupe dans son ensemble, trekkeurs comme porteurs. Il n’est pas uniquement là pour mettre l’ambiance à la népalaise (hihi) bien qu’il y contribue beaucoup mais son rôle principal est d’assurer la sécurité du groupe et sa cohésion dans les différentes situations possibles qui pourraient se présenter lors du trek. Des imprévus peuvent arriver et c’est au guide à prendre les bonnes décisions au bon moment. Ce n’est pas toujours évident mais généralement tout se passe bien et il y a une bonne ambiance et solidarité entre les personnes, trekkeurs comme porteurs. Les soirées de trek sont souvent animées de danses et de chants, de jeux de cartes et de discussions qui permettent de faire connaissances et de passer de bons moments ensemble.

Le rôle des porteurs est très important. Sans eux, le trek ne serait pas possible. Leur métier est difficile mais vital pour eux. Ils travaillent loin de leur famille pendant plusieurs mois durant les saisons de trek. Ensuite ils retournent à leur village pour s’occuper de leur famille et de leurs cultures et élevage. L’agence veille à ce que leurs conditions de travail soient correctes, qu’ils soient équipés pour la marche et l’altitude (veste, bonnet, gants, chaussures, etc.) et que leur charge ne soit pas trop lourde. D’où l’importance de respecter les consignes indiquées dans les fiches techniques données par l’agence et de ne pas dépasser les 12 kg par sac durant le trek.

Lorsque nous allons guider un groupe, nous avons conscience que les différents personnes du groupe ne se connaissent pas toujours… Chaque personne vient avec sa personnalité, son âge, ses aptitudes physiques, ses attentes… ainsi, il peut y avoir dans le groupe beaucoup de diversité, des jeunes, des plus âgés, des caractères très différents, certains marchent vite, d’autres lentement, certains préfèrent marcher seul, d’autres préfèrent la compagnie, certains sont timides, d’autres pas… parfois il y en a qui se disputent, d’autres qui tombent amoureux… mais l’important est que tous sont venus de loin pour vivre une belle aventure et découvrir le Népal et que chacun par sa personnalité et sa diversité apporte un plus au trek et au groupe.

En trek, nous les guides, nous faisons notre mieux pour veiller sur chacun comme un père defamille, nous faisons en sorte que les relations entre les personnes se passent bien, autant chez les trekkeurs que dans l’équipe des porteurs. Car en fait durant le trek, nous formons une sorte de grande famille et nous devons vivre ensemble avec toutes nos différences de personnalités et de cultures… Parfois avec les différences culturelles, certaines situations sont perçues différemment et peuvent poser problème …

Par exemple, nous, Népalais, nous avons l’habitude de manger un grand dhal bat le matin et le soir…et le midi… nous ne mangeons pas vraiment ou en tout cas pas grand-chose… c’est pour cela que nous avons l’habitude de marcher longtemps sans faire attention à l’heure du repas… Il est arrivé un jour que le déjeuner s’est fait tard à cause d’une longue étape le matin et nos amis trekkeurs avaient très faim et avaient besoin de manger, ils n’étaient pas très contents d’avoir attendu si longtemps pour manger …ils ont pensé que je n’avais pas pu gérer bien la situation avec les porteurs partis devant pour réserver le lodge alors qu’en fait je n’avais pas pensé que cela aurait pu être un problème… Mais grâce à cette situation, j’ai compris et j’ai appris que je devais faire attention aux heures des repas et à la distance entre les étapes et les repas… que vous aviez certaines habitudes qu’il fallait que je les respecte quand c’est possible. Avec l’expérience, petit à petit j’ai appris à voir avec des yeux de français et à comprendre vos coutumes… et quand vous venez au Népal, je pense que vous apprenez aussi petit à petit à voir avec des yeux de népalais et à comprendre nos coutumes…ainsi nous apprenons les uns des autres, ce qui rend l’aventure encore plus intéressante.

Il m’est aussi arrivé de devoir expliquer qu’il faut avoir la sagesse de ne pas passer le col lorsque c’est trop risqué (trop de neige, mauvais temps, avalanche, glace, etc.) On m’a répondu un jour: j’ai payé pour y aller, donc je veux y aller, c’est mon objectif, tu dois m’y emmener…je me sens capable d’y aller. Je me sentais désolé d’insister et d’expliquer à cette personne qu’en montagne, le risque zéro n’existe pas, même si toutes les conditions sont réunies et que ça semble simple.  La sécurité et la décision de passer ou pas un col n’entre pas en compte dans le calcul du prix d’un trek.  Je ne renonce pas facilement à passer un col, au contraire, j’essaie toujours de faire mon mieux pour que tout le groupe puisse arriver à le faire mais si je prends la décision de ne pas le passer, c’est parce qu’il y a des risques réels. Il faut nous faire confiance, nous connaissons les chemins et difficultés qui peuvent se présenter.

Le dernier soir avec les porteurs, c’est la fête et la remise des pourboires !  Nous dansons, chantons et partageons un bon repas avec le célèbre gâteau de trek ! Ensuite c’est la remise officielle des pourboires aux porteurs. C’est une coutume chez nous qui permet de savoir si le groupe a apprécié le travail de l’équipe népalaise. Souvent il vous paraît plus facile de remettre une enveloppe commune pour les porteurs afin qu’ils se la partagent, mais en fait il vaut mieux faire une enveloppe par porteur et la remettre personnellement à chaque porteur. La raison est qu’ils se sentiront davantage gratifié, non pas qu’ils demandent plus de pourboire mais parce que le pourboire qui leur est remis de façon personnelle est un signe d’estime et de reconnaissance du travail qu’ils ont réalisé.

Il y a encore beaucoup d’autres différences entre nos cultures dont beaucoup sont citées dans les informations pratiques et dans les livres ( éviter les vêtements courts, couvrir les épaules, demander avant de prendre les photos des personnes si elles sont d’accord, éviter de donner des bonbons aux enfants pour ne pas les encourager à mendier…) ce sont des petites consignes qui sont importantes et qui seront fort appréciées par les Népalais.

Enfin et pour finir cet article… le métier de guide et porteur nous permettent aussi d’être le témoin de belles histoires d’amitié et d’amour qui naissent dans l’Himalaya et qui continuent leur chemin chez eux… Ainsi cela me fait plaisir lorsqu’à votre retour, j’ai des nouvelles de vous. Je suis heureux lorsque j’apprends que vous vous rencontrez et faites des randonnées entre vous, que certains d’entre vous sont tombés amoureux en trek, et après se marient et ont des enfants . Nos vies continuent, chez vous comme chez nous, mais les moments passés ensemble durant les treks restent gravés dans nos cœurs et nous donnent beaucoup de joie et de souvenirs.

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